Le directeur général de la Société de gestion des infrastructures publiques dans les pôles urbains de Diamniadio et du Lac Rose (Sogip), Dame Mbodji, a récemment révélé que l’entité qu’il dirige est en train de rembourser à une banque de la place un prêt de 46 milliards de francs CFA accordé dans des conditions nébuleuses. Libération renseigne dans son édition de ce lundi 7 avril que l’affaire est plus grave que ce que ce dernier a porté sur la place publique.
Les fonds étaient destinés à la construction de l’université Amadou Makhtar Mbow dont les installations ont été inaugurées en décembre 2022, deux ans après le démarrage des enseignements. Le crédit est accordé par la Bank of Africa (BOA) sur la base d’une convention de crédit conclu, le 14 septembre 2016, dans des conditions que le quotidien d’information juge scandaleuses.
Au terme d’un appel d’offres restreint lancé en 2015, l’État avait attribué le marché de construction de l’université au groupement Yildrim holding AS/Eti Béton/Touba Matériaux. Mais à la place de ce consortium, c’est Marylis BTP qui sollicite et obtient de la BOA une offre de financement pour la construction et l’exécution du marché. Cette entreprise, qui s’était déclarée mandataire du groupement adjudicataire, appartenait à Adama Bictogo, l’actuel président de l’Assemblée nationale ivoirienne.
«Une convention de crédit a été signée le 14 septembre 2016 entre l’État du Sénégal, la Sogip, la BOA et Marylis BTP, bénéficiaire des fonds estimés à 46 milliards de francs CFA et remboursables dans un délai de 82 mois», informe Libération. Suivant les termes de l’annexe 2 de la convention de crédit, que le journal déclare avoir obtenue, l’État délivre un décret valant garantie souveraine de tous les engagements pris par la Sogip pour le remboursement des fonds dus à la BOA.
Le quotidien d’information relève plusieurs bizarreries liées à l’exécution de cette convention. Le montant en question figure dans le lot des engagements de l’ancien régime pris sans l’accord de l’Assemblée nationale et non-inscrits dans les lois de finances et dans les livres de la Direction de la dette publique. Libération signale que ce manquement a été relevé dans le rapport de la Cour des comptes publié en février dernier.
La même source souligne que le montant du prêt est inférieur de plus de 13 milliards de francs CFA au coût du projet. «Pire, embraye le journal, la convention bancaire a été établie avec un taux d’intérêt de 6% Hors taxe, supérieur de trois points au taux requis dans le règlement de la consultation. Plus troublant encore, aucune des sociétés membres du groupement adjudicataire du marché ne fait partie de la convention.»
Si après tous ces arrangements avec l’orthodoxie, le marché était exécuté dans les délais requis, la pilule passerait peut-être mieux. Mais Marylis BTP, qui s’est retrouvé exécutant du contrat, à la place du consortium gagnant, n’y parviendra pas. Au final, l’État résilie son contrat le 27 décembre 2017. Le mal était fait : les fonds étaient engloutis par l’entreprise du président de l’Assemblée nationale ivoirienne, qui sera par la suite liquidée. Au grand dam de plusieurs sous-traitants, signale Libération.
Résultat des courses : la Sogip continue de rembourser un crédit qui est allé dans la poche d’un privé sans que la contrepartie due soit réglée; la construction de l’université Amadou Makhtar Mbow ayant été bouclée par une autre entreprise.
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