L’ancien ministre, membre du SEN APR rappelle certaines vérités juridiques fondamentales.
L’ordonnance de non-lieu rendue en faveur d’Ousmane Sonko et de Bassirou Diomaye Faye par le juge d’instruction est une décision pleinement fondée en droit. Elle s’appuie, poursuit-il, sur la première loi d’amnistie adoptée, laquelle s’applique à tous les faits visés. Aucun recours n’est possible, sauf par le procureur, placé sous l’autorité du ministre de la Justice, lui-même bénéficiaire de l’amnistie.
La décision récente du Conseil constitutionnel, empêchant la promulgation d’une loi interprétative, ne remet nullement en cause la validité de la première loi d’amnistie. Deux chemins sont désormais possibles : laisser la situation en l’état, et l’amnistie reste applicable, ou tenter de faire voter une nouvelle loi, avec le risque qu’elle soit à nouveau censurée commente le spécialiste du droit.
« La décision du conseil constitutionnel est prise dans le cadre du contrôle de la constitutionnalité des lois. La décision rend impossible la promulgation de la loi interprétative par le Président de la république. Deux (2 ) options s’offrent au pouvoir: soit laissé en l’état et la loi portant amnistie est toujours applicable, soit l’assemblée vote une nouvelle loi qui elle-même pourra être soumise à nouveau au conseil constitutionnel pour examen », analyse-t-il.
En tout état de cause, avance Bocar Thiam est d’avis qu’une loi portant amnistie adoptée est éternelle. « Oui, ni abrogation, ni annulation, ni modification ne sont possibles dès lors que la nouvelle loi pénale sera nécessairement plus sévère et donc anticonstitutionnelle », argumente-t-il. Ainsi, une loi d’amnistie, une fois adoptée, est définitive et intouchable.
En droit, elle ne peut être abrogée, annulée, ni modifiée, sous peine de créer une loi plus sévère, anticonstitutionnelle par essence. Aucune démocratie au monde n’a jamais connu l’abrogation d’une loi d’amnistie.
Concernant les faits liés aux événements de mars 2021 à mars 2024, il faut être clair : tous les crimes et délits sont amnistiés, sans distinction. Seuls échappent à l’amnistie les crimes de génocide, crimes contre l’humanité ou crimes de guerre, définis par le droit international. Or, le Sénégal, premier pays à avoir ratifié le Statut de Rome de la CPI en 1998, n’est concerné par aucun de ces crimes.
Le reste, crimes de sang, actes de torture isolés, est couvert par l’amnistie. Ceux qui affirment le contraire ignorent ou travestissent le droit.
Le pouvoir doit agir avec lucidité : aucune loi désuète ou maladroite ne peut effacer une amnistie définitivement acquise.
« Donc arrêtez de hurler partout que les crimes de sang sont imprescriptibles. Seuls les crimes au regard du droit international le sont donc crimes contre l’humanité, génocide ou crimes de guerre. Une torture sans crime contre l’humanité est amnistiée », invite Me Moussa Bocar Thiam, membre SEN APR.
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