Résistance au changement, blocages interinstitutionnels, communication défaillante : les cadres de l’administration sénégalaise ont dressé un tableau sans concession des obstacles à la transformation de l’État voulue par le pouvoir
En collaboration avec la Fondation pour le renforcement des capacités en Afrique (ACBF), le ministère de l’économie, du Plan et de la coopération (MEPC) a procédé hier au lancement officiel de la deuxième cohorte du programme d’excellence en leadership dans le secteur public africain (LEAPS) pour la période 2025/2026. Profitant de cette tribune, des cadres de l’administration sénégalaise ont passé au peigne fin les défis liés à la gestion des finances publiques et au changement systémique prôné par le nouveau régime.
Porté au pouvoir en 2024, le président Bassirou Diomaye Faye a initié une transformation systémique de l’État à travers une réforme ambitieuse des finances publiques et un plan de renouvellement économique et social. Suite à l’audit des finances publiques qui a révélé un déficit budgétaire évalué à 12,3 milliards et une dette publique de 4,9 milliards, les autorités ont lancé un programme d’ajustement destiné à ramener les comptes publics aux standards internationaux. Mais à l’épreuve du terrain, cette mutation se heurte à de nombreux obstacles structurels. Il s’agit, selon Baye Samba Diop de l’Arcop, d’une résistance persistante au changement.
De l’avis de ce récipiendaire de la première cohorte du programme d’excellence en leadership dans le secteur public africain (LEAPS), les services administratifs, souvent attachés à des pratiques anciennes, peinent à intégrer les nouveaux mécanismes de gestion et les réformes structurelles engagées.
À l’en croire, le succès du management du changement dépendra d’une meilleure appropriation des nouvelles procédures et d’un leadership fort, mobilisateur et inclusif. Autrement dit, sans adhésion interne, les réformes risquent de rester au stade du discours. A ce défi s’ajoute celui de la collaboration interinstitutionnelle. Bien que le pouvoir exécutif, le législatif et le judiciaire affichent leur volonté d’avancer ensemble, M. Diop relève que les divergences organisationnelles freinent la dynamique. De même que les enjeux de pouvoir, les intérêts contradictoires et les lourdeurs juridiques qui entravent l’action commune.
Pour y remédier, il recommande d’instaurer une stratégie claire de coopération, fondée sur la confiance, la concertation et la transparence dans la conduite des réformes. Enfin, la communication apparaît comme un levier négligé mais essentiel. La méfiance du public à l’égard des annonces officielles et la faible valorisation des outils numériques fragilisent, selon toujours ce cadre de l’administration, la portée des réformes. Il appelle ainsi à une stratégie globale de communication publique, adaptée aux différents publics et fondée sur la pédagogie, la réactivité et la proximité.
L’usage accru des réseaux sociaux et des plateformes digitales est également recommandé pour renforcer la transparence et la participation citoyenne. Présidant la cérémonie de remise d’attestation aux 18 récipiendaires, le représentant du ministère de l’Économie, du Plan et de la Coopération, Alaya Ouarmé souligne que le LEAPS constitue un levier stratégique pour accompagner la conduite du changement dans le secteur des finances publiques et pour accélérer la mise en œuvre des objectifs inscrits dans l’Agenda national de transformation Sénégal 2050, ainsi que dans la stratégie nationale de développement (SND) pour la période 2025-2029.
D’où la nécessité pour lui de doter nos cadres supérieurs de compétences techniques et managériales à la hauteur des défis actuels. À l’en croire, le LEAPS incarne l’ambition des plus hautes autorités de l’État de promouvoir un leadership public de qualité, orienté vers la performance, la responsabilité et l’innovation.
En ce sens qu’il offre une approche holistique du développement du leadership, incluant le perfectionnement personnel, la dynamique des équipes, les stratégies organisationnelles, ainsi qu’une compréhension approfondie et appliquée de l’écosystème de la gestion des finances publiques. Il faut souligner qu’après la remise des attestations aux 18 récipiendaires de la 1ère cohorte du programme de «Leadership Excellence in Africa’s Public Sector», une deuxième cohorte a été lancée avec 90 participants représentant six pays dont la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Kenya, le Sénégal, le Zimbabwe, et désormais le Nigeria qui rejoint le programme avec quinze participants par pays.

