Interrogés par L’Observateur, deux analystes politiques ont décrypté la dernière sortie de Ousmane Sonko. Dr Demba Guèye, analyste politique et maître de conférence en analyse du discours, et Assane Samb, journaliste-analyste politique, s’accordent à dire que le tera meeting de Sonko, bien que réussi sur le plan de la mobilisation – ce qui n’étonne guère pour un parti au pouvoir – visait avant tout à répondre à la crise interne du Pastef et à préparer sa candidature pour 2029.
Décortiquant le message, ils soulignent que le meeting avait pour objectif de remobiliser les troupes, de montrer la popularité de Sonko et d’affirmer que le parti reste solide face à l’opposition. Il s’agissait également d’envoyer un signal à Bassirou Diomaye Faye et à certains alliés de la coalition «Diomaye Président» pour rappeler que Sonko détient toujours la légitimité et la force politique du mouvement. Selon le Dr Guèye, Sonko voulait clairement dire : « C’est moi qui détiens les clés. »
Ainsi, souligne-t-il, la promesse d’une annonce extraordinaire, exprimée par le slogan « il y aura un avant 8, il y aura le 8 et il y aura un après 8 », n’était en réalité qu’un outil de mobilisation, le discours n’apportant rien de véritablement nouveau.
Le cœur du discours était centré sur la préparation de sa candidature pour 2029. Pour justifier son inéligibilité passée, Sonko a mis en avant des rapports, comme celui de l’IGF, et critiqué la Justice – notamment la Cour suprême et la Cour d’appel – qu’il accuse d’être contre lui. Selon le journaliste, la seule révélation significative concernait la volonté du FMI de restructurer l’économie, une initiative à laquelle le Pastef s’oppose.
Les attaques contre le Président Diomaye Faye étaient présentes mais plus voilées et diplomatiques que dans ses interventions précédentes. Sonko a adopté un ton moins direct, que le Dr Guèye interprète comme une tentative de « tendre une perche » à Diomaye Faye. Les critiques visaient surtout le changement de cap de ce dernier, qui privilégie désormais la sauvegarde de l’unité nationale en tant que chef de l’État, contrairement à Sonko, qui insiste sur la nécessité de « rendre justice aux victimes ». La menace la plus directe reste l’appel à « refuser de payer l’impôt » si la justice n’est pas rendue, interprétée comme un ultimatum destiné à éviter une confrontation.
Sur le plan institutionnel, ajoutent les analystes, Sonko se trouve dans une position de faiblesse : en tant que Premier ministre, il dépend de Diomaye Faye, qui détient les prérogatives présidentielles, notamment la signature des décrets, pour retrouver son éligibilité. Il privilégie donc le dialogue et la négociation, la confrontation restant une option de dernier recours.
Enfin, les attaques contre des alliés comme Abdourahmane Diouf et Aminata Touré ne sont pas anodines. Ils représentent une menace politique potentielle pouvant permettre à Diomaye Faye de constituer une force alternative et de contourner la pression exercée par Sonko et le Pastef.

