La FIFA revient sur l’exceptionnelle victoire du Sénégal lors du premier match de Coupe du Monde de son histoire face à la France, championne du monde en titre.
France 0-1 Sénégal
Corée/Japon 2002 | Groupe A Stade : Seoul World Cup Stadium, Séoul Affluence : 62 561 personnes But : Papa Bouba Diop (30’)
Les équipes
France
Sélectionneur : Roger Lemerre Onze de départ : Fabien Barthez – Lilian Thuram, Marcel Desailly, Frank Lebœuf, Bixente Lizarazu – Emmanuel Petit, Patrick Vieira, Youri Djorkaeff (Christophe Dugarry, 60’) – Sylvain Wiltord (Djibril Cissé, 81’), Thierry Henry, David Trezeguet.
Sénégal
Sélectionneur : Bruno Metsu Onze de départ : Tony Sylva – Omar Daf, Lamine Diatta, Pape Malick Diop, Ferdinand Coly – Aliou Cissé, Salif Diao, Moussa N’Diaye, Papa Bouba Diop, Khalilou Fadiga – El-Hadji Diouf.
Historique des confrontations précédentes
Aucune
Avant le match
L’ambiance en France est on-ne-peut-plus optimiste à l’aube de la Coupe du Monde de la FIFA, Corée/Japon 2002™. L’issue de la compétition ne fait aucun doute dans l’Hexagone : la France, championne du monde et d’Europe en titre, part en Asie pour broder une deuxième étoile sur son maillot. L’équipementier des Bleus, adidas, en a même fait sa campagne publicitaire.
Dans Les Yeux dans les Bleus 2, Marcel Desailly évoque même « la finale de rêve » que représenterait l’affiche France – Argentine. Sur le terrain, en revanche, les observateurs sont plus dubitatifs. Depuis le probant succès en amical contre le Portugal (4-0) au Stade de France en avril 2001, les Bleus, émoussés, sont poussifs. Ils ont, certes, remporté la Coupe des Confédérations de la FIFA, Corée/Japon 2001 – avec un groupe remanié. Mais la machine s’est ensuite enrayée.
Avec un court succès 2-1 contre la Roumanie, un match nul 0-0 contre la Russie et une défaite 2-1 contre la Belgique, la France patine en 2002. À Suwon, le 26 mai, soit seulement cinq jours avant le match d’ouverture, les Bleus ont toutes les peines du monde à s’imposer 3-2 contre la République de Corée et, surtout, perdent Zinedine Zidane, victime d’une déchirure du quadriceps.
De leur côté, les Sénégalais ont atteint la finale de la Coupe d’Afrique des Nations 2002 (défaite 0-0 a.p., 3 tab à 2 contre le Cameroun) et restent sur deux victoires en trois matches de préparation (2-1 contre la Bolivie en mars, puis 1-0 contre l’Équateur en mai après un court revers 3-2 contre l’Arabie saoudite).
Les Lions s’appuient sur un effectif majoritairement composé de joueurs de D1 française et sont dans une dynamique ultra positive avant d’aborder ce premier Mondial asiatique. Malgré cela, il aurait fallu de sacrés talents de médium pour prédire la suite des événements.
Le match
Comme attendu, les Bleus ont la possession en début de match, mais la vitesse et la verticalité des Sénégalais donnent des frissons à leur défense. À la 22e minute, David Trezeguet se procure la première grosse occasion de la rencontre et touche le poteau sur une frappe enroulée en rupture à l’entrée de la surface.
Dix minutes plus tard, tremblement de terre : après un débordement qui dépose Frank Lebœuf sur le flanc gauche, El-Hadji Diouf – intenable depuis le début du match – centre en retrait pour Papa Bouba Diop au point de penalty. Le Lensois tire d’abord sur Fabien Barthez mais est plus prompt au rebond qu’Emmanuel Petit et peut pousser le ballon au fond des filets. Il marque là un but également resté dans les mémoires pour la célébration mythique qui a suivi.
À partir de là, les Bleus se montrent plus insistants sans être vraiment dangereux jusqu’à la mi-temps. Les Sénégalais, de leur côté, jouent leur match à la perfection en attendant des Bleus peu inspirés pour tenter de les piquer en contre grâce à leur vivacité.
Au retour des vestiaires, la rencontre se poursuit sur le même rythme : le Sénégal reste solide et la France tâtonne. Thierry Henry, meilleur buteur de Premier League 2001/02, manque un but tout fait de la tête à la 56e minute.
Les vice-champions d’Afrique résistent et restent même dangereux : l’Auxerrois Khalilou Fadiga touche la barre de Fabien Barthez peu après l’heure de jeu. Dans la foulée, c’est au tour de Thierry Henry de frapper la transversale sur un ballon enveloppé en dehors de la surface.
Le match se conclut et la Coupe du Monde de la FIFA 2002™ débute sur ce que Thierry Roland, commentateur pour la télé française, décrit alors comme « une mauvaise surprise » mais « pas imméritée » pour le football français.
Entendu…
« Je me souviens de notre causerie d’avant match. Bruno Metsu est rentré dans la salle […] en disant : ‘Qu’est-ce que je pourrais vous dire aujourd’hui ? Je crois que ça fait longtemps qu’on est ensemble. Et je vous connais tellement. Vous êtes tellement fous les gars. Je sais que ce soir après la fin du match, les gens parleront de nous partout dans le monde. Levez-vous et montrez-moi ce que vous savez faire.’ C’était beau. On n’avait pas besoin de se parler, il nous a regardés et il savait ce qu’on était capables de faire ce jour-là. » El-Hadji Diouf, joueur du Sénégal
« Ce match, on l’avait rêvé, pensé et on l’a réalisé. C’est une grande récompense pour le pays et les joueurs. On a travaillé très dur et on est heureux d’avoir réalisé cet incroyable exploit. » Bruno Metsu, sélectionneur du Sénégal
« On s’est pris un but un peu gag sur un contre. Les Sénégalais ont été plus réalistes que nous. On est vraiment déçus car on est passés à côté de quelque chose de grand. » Frank Lebœuf, joueur de la France
« Ils ont fait ce qu’ils devaient faire. On aurait aimé une entame beaucoup plus joyeuse. À nous à l’avenir de mieux négocier ce genre de situation. » Roger Lemerre, sélectionneur de la France
En chiffres
20
Sur les 23 joueurs composant l’effectif du Sénégal à la Coupe du Monde 2002, 20 évoluaient dans le championnat de France. Seuls les deux gardiens remplaçants – Omar Diallo (OCK Khourigba, Maroc) et Kalidou Cissokho (ASC Jeanne d’Arc, Sénégal) – et l’attaquant Pape Thiaw (FC Lausanne-Sport, Suisse) évoluaient hors de l’Hexagone.
5
À l’inverse, seuls cinq joueurs de l’équipe de France évoluaient en France : Ulrich Ramé et Christophe Dugarry (Girondins de Bordeaux), Grégory Coupet (Olympique Lyonnais), Frank Lebœuf (Olympique de Marseille) et Djibril Cissé (AJ Auxerre).
3
Lors de la Coupe du Monde de la FIFA, Corée/Japon 2002™, l’équipe de France comptait les meilleurs buteurs de trois des cinq championnats majeurs européens : David Trezeguet (Italie, 24 buts), Thierry Henry (Angleterre, 24 buts) et Djibril Cissé (France, 22 buts). L’équipe de France a toutefois été éliminée en phase de groupes sans marquer le moindre but.
Le saviez-vous ?
L’équipe de France de football a, malgré elle, lancé une malédiction. Avant 2002, le Brésil avait été le seul champion du monde en titre à se faire éliminer au premier tour (1966). Entre 2002 et 2018, le Brésil a été le seul champion du monde en titre à se qualifier pour les huitièmes de finale (2006, élimination en quarts de finale contre la France, 1-0).
La France (2002), l’Italie (2010), l’Espagne (2014) et l’Allemagne (2018) ont tour à tour subi ce malheureux sort. Les Bleus, vainqueurs de Russie 2018, ont cependant su éviter le piège en 2022 en se hissant jusqu’en finale (défaite 3-3 a.p., 4 tab à 2 contre l’Argentine).