Pape Ibrahima Faye, plus connu sous le nom de PIF, incarne la sagesse et la bienveillance dans le football sénégalais. En tant que sélectionneur de l’équipe U-17 du Sénégal, il ne se contente pas d’entraîner des jeunes joueurs, il les guide, les façonne et les accompagne avec un cœur aussi vaste que ses ambitions. À l’approche de la Coupe d’Afrique des Nations U-17 CAF TotalEnergies, Maroc 2025, PIF se prépare à une aventure humaine et sportive immense. Mais au-delà de la compétition, c’est une passion dévorante pour le football et pour la jeunesse qui le pousse à continuer son travail avec une énergie inépuisable.
Dans cet entretien, il révèle un homme profondément humain, un entraîneur qui place l’intelligence de jeu et la technique au cœur de ses priorités. Pourtant, ce qui frappe le plus, c’est sa vision bienveillante de son rôle. « Je me considère comme un père pour eux », confie-t-il avec une sincérité émouvante. Pour PIF, ses joueurs ne sont pas seulement des talents à développer, ce sont avant tout des jeunes qu’il aime profondément, auxquels il souhaite transmettre non seulement des compétences footballistiques, mais aussi des valeurs humaines. Il parle d’eux comme un parent bienveillant, prêt à corriger une erreur d’un simple regard, mais aussi à les accompagner dans leur épanouissement personnel.
PIF n’est pas du genre à se laisser perturber par le statut de favori que l’équipe porte sur ses épaules. Pour lui, chaque match est un défi à relever, une occasion de montrer que le travail acharné, la discipline et l’amour du jeu sont les véritables clés de la réussite. Et même si le Sénégal arrive avec le titre de champion en poche, PIF reste humble et résolu, prêt à donner le meilleur de lui-même pour mener ses jeunes lions vers de nouveaux exploits.
Le Sénégal est dans le Groupe C avec la Gambie, la Tunisie et la Somalie. Quelles sont vos impressions ?
Je considère que ce n’est pas une poule facile. Je commencerai par nos voisins gambiens. Comme vous le savez, dans un championnat, les équipes qui se disputent le haut du tableau sont souvent appelées des derbies.
Même lorsque les pays ne sont pas limitrophes, un derby peut exister. Si nous étions dans un football de quartier, nous parlerions d’équipes partageant le même quartier. Sur un plan plus large, géographiquement parlant, un match face à la Gambie est donc un derby.
Nous savons que le Sénégal remporte généralement ces confrontations, mais cela reste un derby, et nous sommes voisins. Vous savez bien comment nous percevons les voisins ici en Afrique : il y a une rivalité naturelle, presque un miroir social. Personne ne souhaite que l’autre soit supérieur. Dans ce contexte, un match Sénégal-Gambie ne peut pas être facile. Mais cela reste du football. Nous allons l’aborder avec sérieux et respect envers notre adversaire, la Gambie.
Concernant la Tunisie, c’est un pays que nous respectons énormément pour son passé et son organisation. Ils disposent d’un bon championnat local, de centres de formation structurés et d’infrastructures de qualité. Ce sont des éléments qui font de la Tunisie un adversaire redoutable.
Quant à la Somalie, c’est une inconnue. Ce pays, ainsi que d’autres comme la Tanzanie ou le Soudan, a des similitudes avec les nations d’Afrique du Nord, comme l’Égypte ou l’Éthiopie. Ces pays privilégient un football technique plutôt que physique. J’ai une idée générale de leur style de jeu, mais je ne connais pas très bien leur football. Toutefois, je respecte énormément leur organisation et leurs clubs, qui font venir des joueurs étrangers.
Vous pouvez donc comprendre que cette poule est loin d’être facile pour le Sénégal.
Vous entamez cette compétition en tant que champion en titre, ce qui fait de vous l’un des favoris. Quelle est votre approche face à cette attente ?
J’ai joué au football et entraîné plusieurs équipes. Un match ne se gagne jamais à l’avance, et un tournoi non plus. On peut être favori, mais cela ne garantit rien.
La raison est simple : après une victoire, on a tendance à se relâcher. Mais ce n’est pas ma philosophie. Je ne me considère pas comme un favori. Je dirige simplement une équipe nationale et je travaille dur pour maintenir son niveau. Mon objectif principal est de qualifier le Sénégal pour la Coupe du Monde. Si nous atteignons la demi-finale ou la finale, ce sera une belle récompense pour notre travail.
Ce statut de favori ne me perturbe pas et ne me fera pas me reposer sur mes acquis.
Lors de la dernière édition, c’était Serigné Saliou Dia qui occupait votre poste. Il dirige aujourd’hui les U20. Échangez-vous sur cette génération talentueuse du football sénégalais ?
Avant qu’il ne prenne en charge les U-20 et que je devienne sélectionneur des U-17, nous entretenions déjà d’excellentes relations, au-delà même du football. Nous avons toujours échangé et partagé nos expériences.
Lorsqu’il dirigeait les U-17, j’étais en charge des U-15. Nous avions déjà l’habitude de discuter, que ce soit sur la sélection nationale ou en club. Aujourd’hui encore, nous continuons à collaborer. C’est une bonne dynamique au sein de la direction technique sénégalaise.
Quels aspects du jeu jugez-vous essentiels pour réussir à ce niveau ?
Il faut exceller dans tous les domaines. Un joueur doit être techniquement au point pour rivaliser avec d’autres cultures footballistiques. Mais il ne suffit pas d’être bon sur le terrain.
Il faut adopter une démarche professionnelle : bien gérer la récupération, l’alimentation, le repos… Tout cela joue un rôle clé. Aujourd’hui, le football ne se limite plus aux performances sur le terrain. La discipline en dehors est tout aussi importante.
Si nous respectons ces principes, nous avons les moyens de conserver notre titre et de qualifier le Sénégal pour la Coupe du Monde.
Pouvez-nous décrire votre groupe ?
Mon groupe est composé de jeunes issus des académies, des centres de formation et des clubs sénégalais. Un seul joueur a déjà disputé la CAN U-17 précédente : Ibrahima Sory Sow, qui est aujourd’hui notre capitaine.
Malheureusement, il n’a pas pu participer au tournoi amical au Maroc la semaine dernière en raison d’une blessure. Tous les autres joueurs viennent des structures locales.
Le profil du footballeur sénégalais est technique. Nous privilégions l’intelligence de jeu et la maîtrise du ballon. J’ai déjà travaillé avec plusieurs de ces jeunes en sélection scolaire et en U-15. Je connais leur potentiel et j’ai confiance en eux pour cette compétition.
Quelles relations entretenez-vous avec vos joueurs ?
À entendre la question, vous me donnez déjà la réponse ! Je me considère comme un père pour eux. Je suis père de famille et j’aime mes enfants. C’est la même chose pour les jeunes de l’équipe, je les aime profondément. Et j’ai à cœur leur bien-être, leur épanouissement. Cela ne veut pas dire que je ne sois pas exigeant. Si un joueur fait une erreur, je le corrige, que ce soit verbalement ou par un simple regard. J’ai une très grande complicité avec eux, vous pouvez me croire.
Quelle est la caractéristique particulière du joueur sénégalais dans votre équipe ?
Le profil du footballeur sénégalais est généralement celui d’un joueur technique, plutôt que très physique. Nous privilégions avant tout l’intelligence de jeu et la technique. L’aspect tactique est essentiel, car ce sont ces qualités qui forment le cœur de notre équipe. Nous nous concentrons sur la technique et la compréhension du jeu plutôt que sur la seule puissance physique. Cela fait partie de l’identité de notre équipe.
Comment se passe votre préparation pour la Coupe d’Afrique des Nations U-17 CAF TotalEnergies, Maroc 2025 ?
Nous venons d’effectuer un tournoi de préparation au Maroc d’où, je suis rentré dimanche à 5 heures du matin et nous avons repris les entraînements dès lundi après-midi. J’ai également convoqué d’autres jeunes que je voulais observer. L’un d’eux, qui vient de France, avait attendu mon retour. Je lui ai donné l’opportunité de s’entraîner avec nous pendant quelques jours avant qu’il ne retourne en France pour attendre sa convocation. Je tiens à préciser que je n’écarte aucun joueur. Tant qu’il a la nationalité sénégalaise et qu’il pratique un bon football, les portes de la sélection restent ouvertes. Jusqu’au dernier moment, je suis prêt à faire appel à tout joueur qui pourrait apporter plus à l’équipe.
Quel regard portez-vous sur le niveau global du football U-17 africain ?
Le niveau des jeunes athlètes africains mérite un grand respect. Ce n’est plus comme avant, où certaines équipes s’imposaient facilement sur le continent. Aujourd’hui, les compétitions majeures, telles que la Coupe du Monde, démontrent que l’Afrique a sa place parmi les grandes nations du football. Les jeunes Africains, qu’ils soient U-17 ou U-20, sont désormais respectés par les autres grandes nations. Ils ont acquis une réelle réputation. Et cela est dû en grande partie au travail des éducateurs africains, qui forment les jeunes talents avec beaucoup de passion et de rigueur. Leur travail mérite un grand respect et je tiens à leur rendre hommage.
À titre personnel, que représente cette CAN U-17 pour vous en tant qu’entraîneur ?
C’est un immense honneur et un grand plaisir pour moi. Nous, Africains, n’avons qu’un seul grand événement continental qui nous rassemble, et cette Coupe d’Afrique des Nations en fait partie. Participer à une telle compétition est une occasion de rencontrer d’autres cultures africaines, de tisser des liens humains et d’apprendre. Connaître des gens du Sénégal, de la Somalie ou de la Tunisie, ce sont des expériences inestimables. La distance entre le Sénégal et la Somalie est énorme, mais cela n’empêche pas de tisser des liens et d’échanger des expériences. Au-delà du côté sportif, cela représente une véritable richesse culturelle. Participer à cette fête du football africain, c’est une chance énorme, et je suis ravi de prendre part à cet événement.