En l’absence de Cristiano Ronaldo et Lionel Messi, qui ne figurent pas parmi les nommés, la 68e cérémonie du Ballon d’Or, lundi soir au Théâtre du Châtelet, va sacrer un nouveau joueur.
Après avoir, un temps, poussé les mieux informés à faire semblant de ne pas savoir, la nouvelle organisation du Ballon d’Or inciterait plutôt les mêmes à faire semblant de savoir. Mais la vérité, ce matin, est que presque personne ne sait. Il n’y a pas eu d’interview du lauréat, pas de séance photo dans son salon avec la récompense, qui aurait voyagé en bagage cabine, pas de promesses faites aux clubs invités à se déplacer, sans savoir, en délégation plénière. Les lauréats potentiels de la 68e cérémonie du Ballon d’Or seront assis dans les premiers rangs du Théâtre du Châtelet lundi soir, dans l’incertitude de leur destin.
Au-delà de la co-organisation par l’UEFA, c’est une année particulière à plus d’un titre, puisque Cristiano Ronaldo (39 ans) et Lionel Messi (37 ans), le tenant, treize Ballons d’Or à eux deux depuis le sacre du Portugais en 2008, ne figurent pas sur la liste des 30 nommés pour la première fois depuis 2003. Bien que la récompense se soit ouverte à d’autres grands talents que le duo (Karim Benzema en 2022, Luka Modric en 2018), une page va se tourner lundi soir, même si le palmarès pourrait confirmer l’impact du Real Madrid sur le football européen en général et sur le Ballon d’Or en particulier.
L’Espagne a des atouts
Car la saison européenne, en 2023-2024, a été traversée par deux courants majeurs, qui vont s’affronter après avoir partagé les votes des cent jurés. Il y a le Real Madrid, vainqueur de la Ligue des champions (2-0 contre Dortmund) et champion d’Espagne, porté par les énormes différences individuelles réalisées par Vinicius tout au long du printemps européen, et qui aura soutenu, d’un même élan, la candidature de Jude Bellingham, bien moins décisif et bien moins brillant dans les matches clé, mais qui aura ajouté à ce titre européen, une finale de l’Euro avec l’Angleterre. C’est beaucoup trop pour passer inaperçu, surtout après une très bonne première partie de saison.
L’autre courant, pareillement espagnol, vient de la sélection d’Espagne, championne d’Europe après avoir dominé l’Euro en Allemagne de sa force et de ses manières. Les Espagnols auront entretenu deux candidatures majeures à la distinction individuelle suprême, Rodri et Lamine Yamal, même si ce dernier, plutôt favori au trophée Raymond Kopa, a contre lui d’avoir été éliminé en quarts de finale de la Ligue des champions avec le Barça (contre le PSG) et de n’avoir pas été champion d’Espagne. Rodri propose un débat essentiel, à l’instant de choisir le meilleur joueur de la saison : champion d’Europe et champion d’Angleterre avec Manchester City, il reste le joueur le plus indispensable à ses équipes, même s’il n’est pas toujours le plus spectaculaire.
Individualiser le football ou distinguer un joueur collectif ?
S’il fallait distinguer la justesse, l’intelligence, la qualité technique, et l’influence, il serait en tête de liste presque tous les ans, et même quand il inscrit le seul but de la finale de la Ligue des champions, en 2023 face à l’Inter (1-0), cela ne suffit pas à remplir les critères aux yeux de la majorité des votants. Que Vinicius et Rodri fassent figure de favoris pour le Ballon d’Or qui sera attribué lundi soir, permet au moins de dégager deux philosophies, une manière d’individualiser le foot, et une manière de distinguer un joueur purement collectif. La richesse de l’après-Messi et Ronaldo sera, peut-être, de disperser les voix sur les profils différents, surtout avec le nouveau système de vote, puisque chaque juré établira une liste de 10 joueurs au lieu de 5.
Il y a beaucoup de peut-être, beaucoup de conditionnel, mais c’est l’idée même de cette 68e cérémonie que d’entretenir le suspense pour surprendre, ou au moins pour solenniser. De même, en marge des désormais traditionnels trophées Kopa (meilleur jeune), Yachine (meilleur gardien), Gerd Müller (meilleur buteur), la cérémonie va également récompenser l’entraîneur de l’année : il y aura du beau monde, lundi soir, au Théâtre du Châtelet.