Alioune Tine, fondateur du centre de réflexion Africajom Center, a rendu visite hier, mercredi aux chroniqueurs Badara Gadiaga et Abdou Nguer en détention. À l’issue de cette visite, il a lancé un appel pressant à leur libération « immédiate et sans condition », les présentant comme des « détenus d’opinion » qu’il a trouvés « en pleine forme avec un moral d’acier ». Selon lui, « le sentiment et la conviction qu’ils sont tous les deux innocents et qu’ils n’ont rien à se reprocher, que leurs dossiers sont vides, expliquent leur sérénité en prison ».
Dans un post sur X (ancienne Twitter), le défenseur des droits de l’homme dresse un portrait élogieux de Badara Gadiaga, qu’il décrit comme un orateur hors pair. « Badara Gadiaga a des compétences exceptionnelles en matière d’éloquence en français comme en wolof. Quand il parle, on l’écoute, parce qu’il a une compétence poétique et narrative qui captent l’attention », a-t-il affirmé, soulignant que le chroniqueur est « un professionnel de la parole et du verbe en démocratie ».
Alioune Tine s’est interrogé sur les motifs de son incarcération : « Est-ce la principale raison de son séjour en prison pour le réduire au silence ? Beaucoup dans l’opinion le pensent aujourd’hui ». Il a rappelé également un passé d’engagement aux côtés du mouvement M23 et une dette personnelle, puisque Gadiaga lui avait rendu visite lorsqu’il était en garde à vue en 2012.
Concernant Abdou Nguer, Alioune Tine rapporte l’avoir vu « souriant avec son Bled, CM2 », ayant « transformé l’espace carcéral en espace d’éducation et de formation en français ». Il a salué sa résilience et son érudition, notant qu’« Abdou est pétri de culture et il est doté d’une exceptionnelle capacité d’argumentation et de persuasion ». Pour le visiteur, Nguer fait partie de ces intellectuels qui ont « contribué à anoblir les chroniqueurs en langue wolof ». Lui aussi est présenté comme une voix qu’il fallait réduire au silence : « Un chroniqueur redoutable doublé d’un opposant redoutable. Il fallait le faire taire lui aussi ».
Au-delà des cas individuels, l’appel d’Alioune Tine s’inscrit dans une volonté d’apaisement du climat national. Il a estimé qu’il « faut les libérer pour apaiser un climat politique et médiatique lourd, pesant et toxique fait d’insultes, d’invectives et de haine entre l’opposition et le pouvoir ».
Son plaidoyer s’adresse à la fois aux autorités et à l’opposition : « Chers leaders de l’opposition, la Nation a besoin de paix, de sérénité et de stabilité. Il faut maintenant civiliser les relations entre le pouvoir et l’opposition. Expurger de la langue politique les injures, les insultes et les invectives ». Il en appelle ainsi à une trêve politique pour permettre la réussite du projet national.